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01/12/2010

Le poème de la semaine

Paul Eluard


Que voulez-vous la porte était gardée

Que voulez-vous nous étions enfermés

Que voulez-vous la rue était barrée

Que voulez-vous la ville était matée

Que voulez-vous elle était affamée

Que voulez-vous nous étions désarmés

Que voulez-vous la nuit était tombée

Que voulez-vous nous nous sommes aimés


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:17 Écrit par Claude Amstutz dans Paul Eluard, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

03/11/2010

Le poème de la semaine

Marie Noël


Mon père me veut marier,

Sauvons-nous, sauvons-nous par les bois et la plaine,

Mon père me veut marier,

Petit oiseau, tout vif te laisseras-tu lier?


L'affaire est sûre: il a du bien,

Sauvons-nous, sauvons-nous, bouchons-nous les oreilles;

L'affaire est sûre: il a du bien...

C'est un mari... courons, le meilleur ne vaut rien!


Quand il vaudrait son pesant d'or,

Qu'il est lourd, qu'il est lourd et que je suis légère!

Quand il vaudrait son pesant d'or,

Il aura beau courir, il ne m'a pas encore!


Malgré ses louis, ses écus,

Ses sacs de blé, ses sacs de noix, ses sacs de laine,

Malgré ses louis, ses écus,

Il ne m'aura jamais, ni pour moins, ni pour plus.


Qu'il achète, s'il a de quoi

Les bois, la mer, le ciel, les plaines, les montagnes,

Qu'il achète, s'il a de quoi

Le monde entier plutôt qu'un seul cheveu de moi! ...


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

06:08 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

27/10/2010

Le poème de la semaine

Henri Michaux


Rends-toi, mon coeur.

Nous avons assez lutté,

Et que ma vie s'arrête,

On n'a pas été des lâches,

On a fait ce qu'on a pu.


Oh! Mon âme,

Tu pars ou tu restes, 

Il faut te décider,

Ne me tâte pas ainsi les organes,

Tantôt avec attention, tantôt avec égarement,

Tu pars ou tu restes,

Il faut te décider.

Moi, je n'en peux plus.


Seigneurs de la Mort

Je ne vous ai ni blasphémés ni applaudis.

Ayez pitié de moi,

voyageur déjà de tant de voyages sans valise,

Sans maître non plus, sans richesse,

et la gloire s'en fut ailleurs,

Vous êtes puissants assurément

et drôles par-dessus tout,

Ayez pitié de cet homme affolé

qui avant de franchir la barrière

vous crie déjà son nom,

Prenez-le au vol,

Et puis,

qu'il se fasse à vos tempéraments

et à vos moeurs,

s'il se peut,

Et s'il vous plaît de l'aider,

aidez-le, je vous prie.


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

01:04 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

20/10/2010

Le poème de la semaine

André Gide


Elle tourna les yeux vers les naissantes étoiles.

Je connais tous leurs noms, dit-elle:

chacune en a plusieurs;

elles ont des vertus différentes.

Leur marche, qui nous paraît calme, est rapide et les rend brûlantes.

Leur inquiète ardeur est cause de la violence de leur course,

et leur splendeur en est l’effet.

Une intime volonté les pousse et les dirige;

un zèle exquis les brûle et les consume;

c’est  pour cela qu’elles sont radieuses et belles.

Elles se tiennent l’une à l’autre toutes attachées,

par des liens qui sont des vertus et des forces,

de sorte que l’une dépend de l’autre et que l’autre dépend de toutes.

La route de chacune est tracée et chacune trouve sa route.

Elle ne saurait en changer sans en distraire aucune autre,

chacune étant de chaque autre occupée.

Et chacune choisit sa route selon qu’elle devait la suivre;

ce qu’elle doit, il faut qu’elle le veuille,

et cette route, qui nous paraît fatale,

est à chacune la route préférée,

chacune étant de volonté parfaite.

Un amour ébloui les guide;

leur choix fixe les lois, et nous dépendons d’elles;

 nous ne pouvons pas nous sauver.


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

03:37 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

13/10/2010

Le poème de la semaine

Pierre Reverdy


Le soir


Le monde est creux

A peine une lumière

L'éclat d'une main sur la terre

Et d'un front blanc sous les cheveux

Une porte du ciel s'ouvre

Entre deux troncs d'arbre


Le cavalier perdu regarde l'horizon

Tout ce que le vent pousse

Tout ce qui se détache

Se cache

Et disparaît

Derrière la maison


Alors les gouttes d'eau tombent

Et ce sont des nombres

Qui glissent

Au revers du talus de la mer


Le cadran dévoilé

L'espace sans barrières

L'homme trop près du sol

L'oiseau perdu dans l'air

 

Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

05:57 Écrit par Claude Amstutz dans Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |

06/10/2010

Le poème de la semaine

Jacques Chessex


Blanche est déjà la lune

Silencieux le vent qui bouge

Et je ne choisis pas quel souvenir

M'accompagnera cette nuit

Le croissant ancien sur la colline

Ou la maison allée au bas du fleuve

Qui m'emplit de mélancolie entre les rives


(Et le vide à ne pas oublier de la neige)


Si plus aucune blessure

Ou le sol revenu herbe ou cendre

Comme si l'humide, la buée

Descendaient dans les choses, la terre

Maintenant terre de printemps


Quelques traces de craie dans le ciel,

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29/09/2010

Le poème de la semaine

Philippe Soupault


Je ne dors pas Georgia

Je lance des flèches dans la nuit Georgia

j'attends Georgia

Le feu est comme la neige Georgia

La nuit est ma voisine Georgia J'écoute les bruits tous sans exception Georgia

je vois la fumée qui monte et qui fuit Georgia

je marche à pas de loup dans l'ombre Georgia

je cours voici la rue les faubourgs Georgia

Voici une ville qui est la même

et que je ne connais pas Georgia

je me hâte voici le vent Georgia

et le froid et le silence et la peur Georgia

je fuis Georgia

je cours Georgia

Les nuages sont bas il vont tomber Georgia

j'étends les bras Georgia

je ne ferme pas les yeux Georgia

j'appelle Georgia

je t'appelle Georgia

Est-ce que tu viendras Georgia

bientôt Georgia

Georgia Georgia Georgia

Georgia

je ne dors pas Georgia

 je t'attends Georgia


Quelques traces de craie dans le ciel,

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22/09/2010

Le poème de la semaine

René de Obaldia


Une jeune fille au fond de mon coeur

Lave mes péchés, lave mes péchés.

Une jeune fille morte de bonheur

Et qui vit en moi pour l'éternité.


Lave mes péchés dans une eau si claire

Que tous les aveugles pourraient y boire.

Le loup et l'agneau sont maintenant frères,

Qu'il fait bon trouver cet heureux lavoir!


Deux colombes d'or forment sa poitrine,

Sa bouche est le temple où souffle l'Esprit

Son ventre est plus doux que celui des tombes

Dans ses mains de neige un feu se nourrit.


Parfois je m'endors contre sa poitrine.

Et tous mes péchés qui s'en vont à l'eau

Feraient de mon âme une âme orpheline

Mais la jeune fille l'habille d'oiseaux.


Un soleil m'éclaire qui vient de très loin

Un soleil de chair que je peux toucher

Et la joie est là comme un fin clocher

Et le ciel a pris une odeur de foin.


Jeune fille pure ô ma belle épée

Riant aux éclats devant la douleur,

Je te porterai le long des années

Plus loin que la mer où sombrent nos coeurs.


Le long des années qui deviennent blanches

Et la neige tombe aux mains des enfants

Je te porterai mon premier Dimanche

Plus loin que la mer et la fin des temps.


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

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15/09/2010

Le poème de la semaine

Louis Calaferte


Si vous êtes raisonnables toute la semaine

Si vous faites bien vos devoirs

Si vous apprenez bien vos leçons

Si vous ne vous battez pas avec vos camarades

Si vous ne tirez pas la queue du chien

Si vous mangez bien votre soupe

Si vous ne faites pas crier votre grand-mère

Si vous vous lavez les mains avant de vous mettre à table

Si vous vous brossez bien les dents

Si vous allez vous coucher sans pleurer

Si vous faites votre prière tout seuls

Si vous êtes bien sages avec maman

Dimanche on ira voir papa à l'asile


Je vous laisse tomber. Je ne marche pas dans vos conneries d'avenir idyllique.

 

Quelques traces de craie dans le ciel,

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10/09/2010

Le poème de la semaine

Andrée Chedid


Nos jours sont éphémères

Plus rapides que le temps

La clarté nous surprend

Déjà c'est crépuscule


C'est si court

Un seul jour

Mais si vaste à la fois

Chaque journée est une fête

Une vraie épiphanie


Pleine de tous les rêves

De toutes les panoplies

Dont le futur est maître

Retenant nos mémoires

Et chroniques du temps

Si longue est notre vie


Ces journées éphémères

Pas le temps

De les perdre

Si brève est notre vie!


Quelques traces de craie dans le ciel,

Anthologie poétique francophone du XXe siècle

00:22 Écrit par Claude Amstutz dans Andrée Chedid, Quelques traces de craie dans le ciel - Anth | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature; poésie | |  Imprimer |  Facebook | | |